Avoir 20 ans
Avoir 20
ans ! le
6 février 2016
« Plutôt
pas mal la nénette ! » je dis en me contemplant avec complaisance
dans le grand miroir de ma chambre. Ce miroir avait déjà été un sujet d’embrouille
avec ma mère (oh là, là, la famille !) qui ne comprenait pas l’utilité de
cet accessoire pour une ado de 16 ans. Accessoire, laissez- moi rire rien ne
m’a jamais été aussi utile pour ne pas dire indispensable. Ce matin l’examen
est satisfaisant : grande mais pas trop, élancée, bronzée et chevelure éclatante
une vraie pub de mode (l’examen n’est pas tout à fait impartial). Au fait je
m’appelle Ana et je suis d’un naturel
optimiste. Je me prépare donc dans la joie et la bonne humeur à cette nouvelle
journée de farniente ; c’est chouette les vacances surtout quand on a la
chance d’habiter, toute l’année, à proximité de la plage. La sonnerie du
portable m’avertit de l’arrivée d’un SMS. A cette heure c’est inhabituel, je
regarde c’est Enzo mon cher et tendre ; on ne se quitte plus depuis au
moins six mois ...Le message est laconique et le ton est plutôt sec :
« Désolé
Ana mais je ne viendrai pas à la plage avec toi aujourd’hui ni les autres
jours. J’ai rencontré une autre fille et je préfère te le dire tout de suite,
c’est plus honnête. Sans rancune. Bisous. Enzo. »
Patatras!
Sciée je suis sciée. Quel salaud !mais quel salaud !me faire ça à
moi, en pleines vacances et les copines ...qu’est- ce qu’elles vont dire les
copines ? Pas le temps pour le chagrin, trop honte. Avec tout ce qu’il
disait, les promesses ...mais à qui se fier ? Je suis seule, toute seule
je veux mourir !heu... peut- être pas... mais au moins ne plus sortir. Subitement
je m’effondre en larmes et je pleure, je pleure sans fin pas seulement pour ça
mais pour tout le reste : ce monde pourri qui n’est qu’une vaste
fumisterie. Je sanglote, je hoquète, je mouche bruyamment et ma mère accourt effrayée. Un coup d’œil rapide sur le
téléphone, le message et tout est dit : « le salaud ! » ma
mère pour une fois est d’accord avec moi, ça fait du bien.
-Ne le
pleure pas, c’est trop pour un connard pareil (elle devient grossière c’est
nouveau ça !)Tu es mille fois mieux que lui (c’est un peu vrai ça !)
et plains cette pauvre fille qui va se récupérer ce minable (il est habillé
pour l’hiver ! mais au fait : c’est qui cette nana ?) Tu devrais
sortir ça te ferait du bien de t’oxygéner un peu (ici on soigne tout avec un
grand bol d’air iodé)
- Non. J’ai
pas le cœur (et puis j’ai les yeux tout gonflés !)Je vais me mettre dans
le jardin.
Je traine la
chaise longue au soleil, on n’est pas si mal ici...et je réfléchis enfin...
j’essaie :
· Est-ce que je l’aimais ?
Bof, pas tant que ça !
· Est-ce que j’ai du chagrin ?
Bof, pas tant que ça !
· Est-ce que tu es en colère ?
Ah ça c’est sûr !en colère et vexée et furieuse....
La situation
est grave mais pas désespérée. Contente de cette fine analyse de la situation
et épuisée par toutes ces émotions je m’endors au soleil. Ma mère me réveille
pour le déjeuner et, ravie, découvre que je n’ai pas perdu l’appétit. C’est
bien d’avoir une bonne nature !
La journée
j’ai glandouillé dans la maison et les jours suivants aussi. Mon gros problème
c’était de retrouver le monde extérieur et les amis ( ?) avec leurs
regards faussement apitoyés (je suis sûre qu’au fond ils ne sont pas si
mécontents que ça).
Au bout
d’une semaine je me suis décidée à sortir pour la fête de la mer qui, tous les
ans, autour d’animations diverses, réunit les nazairiens sur la promenade du
bord de mer...J’ai pris le plus grand soin à mon apparence (bien utile le
miroir !) et, plus belle que jamais, affichant une assurance un peu
surfaite je suis partie à la fête. Que de monde, c’est bien quand on est seule,
on se fond, on se glisse entre les groupes de badauds, on s’agglutine aux
spectateurs et c’est comme ça que je me suis surprise à rire aux éclats devant
une troupe de comédiens talentueux.
Merde !
C’est alors que je l’ai vu arrivant main dans la main avec sa nouvelle conquête
(pas terrible d’ailleurs mais la question n’est pas là dans l’immédiat). Que
faire ? Ne pas perdre la face surtout, si seulement j’étais accompagnée ça
changerait la donne. Je regarde autour de moi pour m’éclipser sans qu’il me
voit et mes yeux croisent le regard d’un jeune homme, Wouah !,
magnifique : grand, beau, athlétique et bronzé et il me sourit ! Je
n’hésite pas une seconde et m’approche de lui
-ça ne vous
ennuie pas de passer votre bras autour
de mon cou un peu comme si on était amoureux ? (il me regarde interdit) Je
ne suis pas folle, enfin j’espère, je vous explique tout dans cinq minutes.
Il s’exécute
je dois dire avec un certain empressement et au- delà de mes espérances .Si
bien que lorsque l’autre connard (comme dit ma mère) est passé avec sa copine
je lui ai lancé un « hello ! » retentissant qui l’a soufflé !
Après deux ou trois banalités ils sont partis, lui se posant certainement des
questions sur l’inconstance féminine.
On a attendu
la fin du spectacle, dans la même position, c’était pas très délicat de lui
dire que c’était fini de jouer (et j’en avais pas vraiment envie)
Ensuite j’ai
voulu lui expliquer mais il avait déjà compris, on a bien ri (il a l’air
marrant ça me change de l’autre !). J’ai tenu à lui offrir un verre pour
le remercier.
Que dire
encore. Il s’appelle Floran et ma mère l’aime bien !
A.LEMAITRE
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